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Gardiennes - Note d’intention de l’auteure :

Depuis mon enfance, j’ai été bercée par les histoires et mésaventures de mes grandes tantes, de leurs filles, de ma grand-mère et de ma mère.
J’ai toujours été étonnée par le grand écart qu’il y avait souvent entre les situations dures qu’elles avaient vécues, les mots crus qu’elles utilisaient pour en parler, et le ton enjoué, l’énergie et les rires dont elles faisaient preuve en les racontant.

Jusque dans les années 70, être femme se réduisait trop souvent à une vie domestique, où les grossesses, les maternités, les fausses couches et les risques que cela entrainait rythmaient leur quotidien jusqu’à la ménopause.

Ce quotidien, c’était leurs histoires de « bonnes femmes » sur des sujets souvent tabous, qui ne se disaient qu’entre femmes. Les générations qui ont suivi (ainsi que beaucoup d’hommes d’alors) ont peu conscience de ce qu’était cette réalité. Il me semblait nécessaire, indispensable de la rappeler, de la raconter.

Mes arrières grands-tantes me disaient souvent :
« Roh ! Il faudrait qu’on en fasse un livre, de nos histoires. Y a de quoi faire ! »
Alors, j’ai eu besoin de rendre hommage à ces gardiennes de la vie, à ces gardiennes des secrets. Pour célébrer leur courage, leur abnégation et leur joie de vivre.

De ces sujets délicats - l’intimité, la sexualité souvent subie… -, j’ai voulu écrire une pièce en forme de témoignage, un texte qui leur ressemblerait, en reprenant leurs paroles souvent touchantes, drôles parfois, perlées de poésie, mais toujours sincères et vraies, incarnées. Ces femmes ordinaires n’étaient pas des intellectuelles, mais avaient l’intelligence du cœur, le bon sens populaire et le parler juste.

En découvrant dans « Gardiennes » ce qu’elles ont vécu, on pourrait les croire appartenant à un passé disparu, évanouies avec l’âge depuis longtemps. Pourtant, à bien plus de quatre-vingts ans, certaines de ces merveilleuses femmes sont toujours en vie, repeignant elles-mêmes leurs plafonds, détachant et cousant des rideaux, faisant leurs courses et entretenant leur intérieur. L’une d’elles, partie avant la fin de l’écriture, m’empruntait encore mon costume de cancaneuse, il y a quelques années à l’âge de 79 ans, pour aller danser le french-cancan !

J’espère que j’aurai leur énergie, leur vitalité au même âge et que le spectateur aura autant de bonheur à les découvrir que j’ai eu à les connaitre.